Lorsque vous devez effectuer des mesures électriques extrêmement précises, notamment pour une résistance très faible avoisinant quelques milliohms, un multimètre standard devient rapidement inadéquat. Sa précision ne permet pas de distinguer des variations aussi faibles. Or, dans certains cas (vérification de la qualité d’un contact électrique, mesure de résistance d’un shunt, d’un bobinage ou d’un câble), ces valeurs comptent énormément.
Alors comment faire sans milliohmmètre ? La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des méthodes alternatives fiables et économiques.
1. Le principe : La méthode des 4 fils (ou Méthode Kelvin)
La clé pour mesurer des résistances infimes sans être faussé par la résistance de vos propres câbles de test est la méthode à quatre fils, aussi appelée méthode Kelvin. De fait, cette approche repose sur un principe simple et élégant :
- Faire circuler un courant connu (I) dans la résistance à mesurer en utilisant une première paire de fils (appelés fils de force).
- Mesurer la chute de tension (U) aux bornes de cette résistance avec une seconde paire de fils distincts (les fils de sens).
Ensuite, il suffit d’appliquer la célèbre loi d’Ohm : R=U/I.
Pourquoi 4 fils ?
C’est la question essentielle. Lorsque les mêmes fils sont utilisés pour injecter le courant et mesurer la tension, leur propre résistance ainsi que celle des points de contact s’ajoutent à la valeur mesurée. Pour des résistances très faibles (quelques milliohms), la résistance de vos câbles pourrait être supérieure à celle que vous essayez de mesurer, rendant le résultat complètement erroné. En utilisant deux fils pour le courant et deux autres distincts pour la mesure de la tension, vous éliminez ce biais. En effet, grâce à l’impédance d’entrée très élevée du voltmètre, celui-ci ne tire qu’un courant infime. Cela rend la chute de tension dans les fils de mesure négligeable.
2. Le matériel nécessaire
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, vous n’avez pas besoin d’un équipement de laboratoire sophistiqué et coûteux. Voici ce qu’il vous faut pour mettre en œuvre cette technique :
Une alimentation de courant constant
C’est l’élément central de votre système. Idéalement, une alimentation de laboratoire devrait être en mesure de fournir un courant constant et spécifique (par exemple, 1 Ampère, 10 Ampères, en fonction de la résistance attendue et de la robustesse de l’échantillon). Si vous ne disposez pas d’un tel dispositif, un montage simple avec une source de tension (une batterie de voiture, par exemple). Aussi, une résistance de référence de précision (pour définir le courant via la loi d’Ohm) peut faire l’affaire, à condition de mesurer précisément le courant qui circule.
Un multimètre numérique capable de lire des mV
Un multimètre numérique de qualité, même grand public, fait généralement le travail tant qu’il propose une résolution adéquate en millivolts (mV). Plus sa précision est élevée (par exemple, un modèle 4,5 digits), plus votre mesure sera fine.
Des fils de mesure fins et propres
La propreté des connexions est capitale. Pour mesurer la tension, privilégiez des fils spécifiques et aussi courts que possible. De plus, assurez-vous que les points de contact sur votre échantillon sont nets et exempts d’oxydation. Ainsi, des pinces crocodiles de qualité ou, mieux encore, des mini-pinces « Kelvin » (si vous en avez) garantiront un bon contact.
Si possible, un petit montage de type Arduino ou Raspberry Pi pour piloter le courant de façon plus précise (optionnel) : Pour les plus bricoleurs, ces microcontrôleurs peuvent être utilisés avec des modules complémentaires (voir « Astuce bonus ») pour créer une source de courant encore plus stable. Aussi, ils permettent d’automatiser la lecture, ce qui augmente la précision et la reproductibilité des mesures.
3. Réalisation d’un montage simple
Voyons un exemple concret de montage avec une alimentation de courant constant réglée à 1 Ampère :
1. Préparation du circuit :
Raccordez votre source d’alimentation stable (par exemple, une alimentation de laboratoire réglée sur 1 A) et connectez ses deux bornes (force positive et force négative) aux deux extrémités de la résistance que vous désirez examiner. Il s’agit de vos deux premiers fils (ceux du courant).
Ensuite, prenez votre multimètre et réglez-le en mode voltmètre avec la gamme la plus sensible (par exemple, en millivolts).
Branchez les sondes de votre multimètre directement aux mêmes points de résistance que vous mesurez, mais via des fils séparés et indépendants des fils de courant. Veillez à ce que ces fils de mesure soient placés au plus près des zones où la résistance est effectivement située, afin d’éviter une mesure de la chute de tension dans vos câbles d’alimentation.
2. Mesure et calcul :
Tout d’abord, permettez au courant de se stabiliser dans le circuit. Puis, consultez la tension (U) indiquée par votre multimètre. D’ailleurs, cette tension sera typiquement très faible autour de quelques millivolts. Par la suite, mettez en œuvre la loi d’Ohm. Par exemple, si vous lisez 5 mV et que vous faites circuler 1 A (soit 1000 mA), alors : R=0.005 V/1 A=0.005 Ohm=5 milliohms.
Attention à la précision :
Courant élevé pour une meilleure lecture : Plus le courant que vous injectez est élevé, plus la chute de tension aux bornes de la faible résistance sera importante et donc plus facile à lire avec précision par votre multimètre. Veillez cependant à ne pas dépasser les capacités de la résistance à tester (échauffement, destruction).
La propreté des connexions : C’est un point critique. L’oxydation, même minime, sur les pinces crocodiles ou sur les points de contact de votre échantillon peut introduire une résistance parasite qui fausserait la mesure. Alors, nettoyez toujours bien les surfaces de contact avant de brancher vos fils.
4. Astuce Bonus : Utiliser un arduino ou raspberry Pi
Pour les passionnés de DIY (Do It Yourself) et d’électronique, il existe divers projets open source passionnants permettant de transformer un microcontrôleur comme un Arduino ou un Raspberry Pi en un véritable mini-milliohmmètre, offrant une précision et une automatisation améliorées :
- Génération de courant constant : Ces projets utilisent souvent des circuits intégrés spécialisés comme le LM317 (en montage source de courant) ou le LT3092 pour créer une source de courant très stable et précise.
- Lecture de tension haute précision : Les entrées analogiques des Arduino classiques peuvent manquer de résolution pour les microvolts. On y ajoute alors un convertisseur analogique-numérique (CAN) externe haute précision, tel que l’ADS1115 (16 bits), qui permet de lire des tensions avec une finesse exceptionnelle.
- Affichage et interface : Les résultats peuvent être affichés directement sur un petit écran LCD ou via le moniteur série de votre ordinateur, facilitant la lecture et l’enregistrement des données.
Certains projets vont même plus loin en intégrant des fonctionnalités innovantes, comme un milliohmmètre sonore qui émet un son dont la tonalité varie en fonction de la résistance mesurée. C’est incroyablement pratique pour tester rapidement et « en live » la qualité de contacts ou de soudures sans avoir les yeux rivés sur l’écran.
Conclusion : Mesurer avec précision, sans se ruiner
Il est tout à fait faisable et accessible de mesurer une résistance très faible, même en l’absence d’un équipement spécialisé coûteux comme milliohmmètre . En fait, la clé réside dans l’utilisation de manière stricte d’une méthode appropriée, comme celle des 4 fils, qui élimine les erreurs associées à vos câbles et connexions. Avec un peu de rigueur dans le montage, du matériel simple et parfois un peu d’ingéniosité électronique pour les projets DIY, vous pouvez atteindre des résultats tout à fait précis et fiables.
C’est une aptitude essentielle pour tout électronicien, technicien, ou passionné souhaitant saisir et maîtriser les plus petites résistances dans ses circuits et systèmes.
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